Dans certaines écoles, les élèves ont déjà droit à leur quart d'heure de lecture quotidien !
Nous avons recueillis quelques témoignages.
« Moins de bousculades »
L’Institut de la Providence à Woluwe-Saint-Lambert a instauré il y a déjà plus d’un an, en septembre 2017, un quart d’heure de lecture quotidien. Concrètement, chaque jour de la semaine, les cours s’arrêtent de 10h45 à 11h00, pour permettre à tout le monde (élèves, professeurs, éducateurs, direction, personnel administratif…) de s’adonner, dans le silence, à la lecture de son choix (livre, journal, bande dessinée, manga).
Que retirez-vous de ces 15 minutes de lecture quotidienne ?
« L’expérience fonctionne globalement assez bien, de mieux en mieux même. L’effet principal est que les élèves sont plus calmes. Le quart d’heure de lecture est instauré chez nous avant la récré. Depuis, les élèves se lèvent et partent en récré beaucoup plus calmement. Il y a moins de bousculades. »
Vous avez rencontré des difficultés pour l’instaurer ?
« Cette année, cela se passe plus facilement que l’an dernier parce que l’habitude est instaurée. Pour que l’expérience soit réussie, il faut que ce soit un projet d’établissement, que toute l’école participe. Si certains profs refusent de se prêter au jeu, c’est plus compliqué. Si votre classe est plongée dans le silence en train de lire, mais que du bruit provient de la classe d’à côté, cela suscite des réactions. Mais dès que le projet est lancé, cela crée une dynamique positive dans toute l’école. Cela permet aussi des échanges : lorsque le prof lit un livre qu’un élève a déjà lu, ils en discutent. Cela ouvre également les élèves sur d’autres modes de pensée. Ils lisent parfois des témoignages, qui appellent ensuite au débat… Sur le plan pratique, on a retiré cinq minutes aux trois premières heures de cours de la matinée pour constituer ce quart d’heure de lecture, afin que ce ne soit pas une seule matière qui se retrouve amputée de 15 minutes. »
Tout le monde lit ?
« Il reste des enfants qui ne veulent pas lire. Cela varie en fonction des classes et des professeurs. Cela doit être un acte volontaire : on ne force personne à lire, mais on oblige chacun d’avoir un livre avec lui et de faire silence. On ne peut rien faire d’autre durant ce quart d’heure que lire. On assure cependant un suivi. Si un élève ne veut pas lire de manière répétée, le prof va le voir, lui demande pourquoi, et si c’est parce qu’il ne sait pas quoi lire par exemple, le conseille… Les professeurs en heure de fourche vont dans les classes les plus difficiles. »
Est-ce qu’en dehors de ce quart d’heure de lecture, vos élèves lisent plus qu’avant ?
« Rien ne nous permet de l’affirmer. Lorsqu’on leur pose la question, certains disent lire autant qu’avant, d’autres plus… »
Personne de contact : Xavier Bergen
Téléphone : + 32 (0)479 44 81 09
« Un moment agréable »
La pratique existait déjà dans certaines classes. L’école primaire Henriette Dachsbeck a décidé de l’institutionnaliser il y a un mois, en mars 2019. Son nouveau directeur, Gaetan Huygens, nous explique comment ce quart d’heure de lecture y a été mis en place.
Depuis quand avez-vous instauré ce quart d’heure de lecture ?
« Nous avons démarré officiellement il y a un mois. Une dynamique existait déjà. Les élèves avaient une activité bibliothèque toutes les deux semaines. Certains professeurs le pratiquaient déjà, de façon plus ou moins régulière, dans leur classe. Mais désormais, ce n’est plus un moment de classe, c’est un moment d’école. On le fait tous ensemble. Nous avons décidé de l’instaurer juste après le temps de midi, qui est rarement un moment apaisant ! Cinq minutes après la fin du temps de midi donc, de 13h20 à 13h35, on lit. Je m’installe au milieu du préau avec ma collègue bibliothécaire. Et c’est parti ! Après un moment bruyant, intense, où il faut gérer les conflits, continuellement s’assurer que tout va bien, ces 15 minutes font vraiment du bien ! »
Ce quart d’heure de lecture a été facile à mettre en place ?
« L’institutionnaliser dans toutes les classes n’est pas si évident que cela. Nous avons la chance d’avoir une antenne de la bibliothèque Brand Whitlock dans l’école. J’avais vu des reportages à la télévision sur ces expériences en France. Mais quand je suis arrivé dans l’école en octobre dernier, je ne me voyais pas l’imposer d’emblée. La première personne à qui j’en ai parlé est la bibliothécaire. Elle a jugé l’idée excellente. Je l’ai partagée avec tout le monde lors de notre réunion de concertation de février. Le projet a fait l’unanimité. C’est ainsi que j’ai appris que certains professeurs le pratiquaient déjà, en fonction de leur réalité de classe ! »
Tout le monde lit ?
« Oui, tout le monde s’arrête, tant les enfants que les adultes. Parfois, je constate un petit peu trop de bruit dans une classe, mais globalement, c’est assez respecté. Je pense que le fait que le directeur s’installe au milieu du préau et lise également pousse tout le monde à le faire. Le mimétisme joue certainement un rôle. »
On peut lire tout ce qu’on veut ?
« Oui. BD, mangas, romans… Mais pas sur un écran. Lire les publications Facebook, pour moi, cela ne compte pas. »
Que retirez-vous de ce quart d’heure de lecture instauré dans votre école ?
« Au-delà du côté enrichissant, de l’évidente progression en lecture, de l’élargissement du champ lexical qui ne peuvent pas laisser le pédagogue que je suis insensible, ce quart d’heure de lecture est perçu comme un moment agréable. Même si les enfants ne devenaient pas meilleurs lecteurs, me dire qu’ils ont leur petit moment pour eux sur la journée, c’est déjà cela. Ce quart d’heure de lecture amène du bien aux gens, et si en plus, il permet de développer le goût de la lecture, c’est encore mieux ! Mon espoir est que ce moment devienne addictif, que si les élèves n’y ont pas droit, ils vivent cela comme une injustice, et qu’ils revendiquent cet acquis par la suite. »
Vous avez des conseils pour les écoles qui voudraient se lancer ?
« Profitez de ces 15 minutes, elles sont chouettes ! Certains évoquent le manque de temps comme frein au projet. Je ne suis pas d’accord. Il ne faut pas considérer ce quart d’heure de lecture comme une perte de temps, mais comme un cours, une partie du cours de français.»
Personne de contact : Gaetan Huygens
Téléphone : + 32 (0)497 83 03 44
Email : Gaetan.Huygens@Brucity.education
« Pas de rapport d'obligation à la lecture »
L’École en Mouvement, à Ixelles, a instauré le quart d’heure de lecture dans ses classes au cours de l’année scolaire 2017-2018. Sa directrice, Sophie Ouvry nous raconte.
Que retirez-vous de ce quart d’heure de lecture ?
« Les élèves éprouvent beaucoup de plaisir de lire, même si au début, quand le projet a été annoncé, ils étaient dubitatifs et peu enclins. Cependant les choses ont changé, et depuis que le quart d’heure de lecture a été mis en place au cours de l’année scolaire 2017-2018, il a pu être observé que les élèves étaient satisfaits d’avoir ce temps de lecture, où il pouvait prendre du temps pour eux à travers des lectures choisies. »
Ce quart d’heure de lecture a été facile à mettre en place ?
« Il n’y a pas eu de difficultés à instaurer ce projet. La première année les enseignants avaient décidé d’organiser le quart d’heure de lecture l’après-midi, après la pause de midi, ce qui permettait aux élèves d’avoir un temps de calme et de concentration avant de reprendre les activités de l’après-midi. Puis, pour des raisons d’organisation avec les différents enseignements, il a été décidé d’avancer le quart d’heure de lecture après la récréation du matin, donc de 10h30 à 10h45. En soi, la mise en place de ce temps de lecture s’est faite sans écueils et très naturellement. »
Tout le monde lit ?
« Comme les élèves ont le choix de leurs lectures, il n’y a pas de rapport d’obligation à la lecture. Ils choisissent les livres qu’ils ont vraiment envie de lire, que ce soit des livres venant de chez eux - des mangas ou autres. Ils lisent tous car c’est un temps qui est dédié à cette activité. Aussi, même les élèves qui ne sont pas encore en âge de lire, profitent de ce temps de « pause » pour avoir la possibilité de parcourir des livres d’images. Tout le monde lit avec plaisir et profite de ce quart d’heure pour s’apaiser. »
On peut lire tout ce qu’on veut ?
« Il n’y a pas de liste de lecture prédéfinie. Les élèves choisissent les livres qu’ils veulent lire et les possibilités ne sont pas restreintes aux romans. »
Personne de contact : Sophie Ouvry (directrice ff)
Téléphone : +32 (0)2 515 65 59
Email : sophie.ouvry@ixelles.brussels
« Créer une habitude »
L’école des Six-Jetons a ceci de particulier qu’elle compte une classe passerelle pour des élèves primo-arrivants. Depuis le milieu de l’année scolaire passée, un quart d’heure de lecture est instauré tous les lundis après la récréation du temps de midi. Le directeur de l’établissement, Yves Leit, nous livre son expérience.
Vous avez rencontré des difficultés pour instaurer ce quart d’heure de lecture ?
« Certains enfants y sont un petit peu réfractaires, même si d’autres en redemandent. Cela prend du temps pour pérenniser ce quart d’heure de lecture et faire que cela devienne une habitude. Il faut dire que nous avons un public particulier, avec plusieurs élèves primo-arrivants et une classe passerelle. Ce n’est pas toujours facile, au niveau de l’ego, dans une même classe, d’accepter que certains lisent encore des livres pour enfants quand d’autres sortent des romans. On a essayé d’inclure tout le personnel de l’école, mais ce n’est pas toujours évident. Nous avons inscrit l’opération dans nos objectifs : mettre en avant et accentuer l’apprentissage de la lecture. On pourrait étendre un peu plus ce quart d’heure à l’avenir. Certaines classes l’étendent déjà, mais pas de manière systématique. Nous avons la facilité d’avoir la bibliothèque des Riches Claires tout près de l’école. Outre le quart d’heure de lecture, on prend le temps d’aller en bibliothèque en d’écouter des histoires. Nous avons aussi un système d’emprunt de livres à l’année avec les Riches Claires. »
Tout le monde lit ?
« Certains ouvrent effectivement un livre ou un magazine devant eux mais n’ont pas les yeux dessus. D’autres parviennent à lire toute une BD en cinq minutes. Il est clair qu’ils ne font que respecter la volonté de l’enseignant. »
Personne de contact : Yves Leit (directeur)
Téléphone : +32 (0)2 508 15 00
Email : Yves.Leit@brucity.education
« Un effet contagion »
En primaire aussi, l’expérience fait ses preuves. L’École libre de Lonzée, une école primaire de Gembloux, teste le quart d’heure de lecture quotidien dans ses classes de 5e et 6e primaires depuis la fin du mois de novembre 2018. Marie-Luce Jonckers nous parle de son expérience avec ses élèves de 6e primaire.
Que retirez-vous de ce quart de lecture quotidien ?
« L’objectif était de redonner le goût de lire aux élèves et de prendre le temps. Aujourd’hui, les élèves en redemandent ! J’entends souvent : « Quand est-ce qu’on lit ? » ! La demande est donc vraiment là. En principe, on lit après la récréation de midi. Cela permet de calmer leur excitation. Je n’ai pas intérêt à oublier, sinon les élèves le réclament ! »
Vous avez rencontré des difficultés pour l’instaurer ?
« Nous avons eu une période de recherche de rythme. Au début, tout le monde lisait le même roman. J’avais prévu de poser des questions sur le livre ensuite, mais j’ai abandonné en voyant que les élèves avaient tellement de plaisir à lire pour « rien ». Je n’accepte pas les BD ni les mangas, pour une question de vocabulaire. Même s’il m’est arrivé de faire des exceptions si l’enfant n’a apporté que ce genre d’ouvrages. La première fois, l’enseignante est allée chercher des livres pour la classe dans une bibliothèque communale proche de l'école. Nous avons une petite bibliothèque en classe, mais nous en avons très vite fait le tour et il nous manque les nouveautés. Parfois, les élèves se prêtent également des livres entre eux. Et nous avons une boite à livres dans la cour de récré qui fonctionne assez bien. Par ailleurs, en février 2018, nous avons organisé dans toutes les classes un « rallye littéraire ». Chaque classe présentait un ouvrage. On tournait de classe en classe. »
Tout le monde lit ?
« La majorité des élèves sont vraiment demandeurs. Au début, je pense que certains faisaient semblant de lire. Mais l’effet « contagion » joue énormément. Même moi, ce quart d’heure de lecture m’oblige à lire davantage. Je lis des documents que je mettais « au frigo » et que je finissais pour oublier. Aujourd'hui, je les mets de côté en me disant que j'y reviendrai pendant mon quart d'heure lecture. »
Personne de contact : Vincent Adam (Directeur)
Téléphone : +32 (0)473 31 25 88
« L'intergénérationnel au service des tout petits »
Abracadabus, asbl regroupant des papys et mamies conteurs, a pour slogan « l’intergénérationnel au service des tout petits ». Sa coordinatrice, Christiane Gijns, nous livre son expérience sur les bienfaits de la lecture à voix haute aux enfants.
Comment se passent ces moments de lecture de vos papys et mamies dans les classes ?
« Pour l’enfant, c’est un vrai bonheur. Nos bénévoles sont accueillis par des ‘Oh, mamie, tu viens raconter’ ! Ils ne lisent pas très longtemps - 20 minutes maximum - pour conserver l’attention. Nos papys et mamies se rendent dans des écoles à discrimination positive, où bien souvent les enfants n’ont personne à la maison pour leur lire des histoires. Avec eux, les enfants peuvent toucher les livres, les manipuler… »
Quels sont vos objectifs ?
« Notre objectif est de faire de ces moments une habitude pour donner aux enfants le goût de la lecture. Ces moments de lecture intergénérationnels leur permettent notamment d’améliorer leur maîtrise de la langue française, d’apprendre de nouveaux mots. Les retours sont très positifs. »
Qui sont vos papys et mamies ?
« Des bénévoles de plus de 50 ans. On insiste sur ce côté intergénérationnel. Il arrive souvent que les parents sont trop occupés par la vie de tous les jours. Les grands-parents peuvent prendre le relais. Je le vois bien avec mes petits-enfants ! »
Personne de contact : Christiane Gijns
Téléphone : +32 (0)2 513 75 35
« À Notre-Dame Heusy, tout le monde lit ! »
L’enseignante Anne-France Kroonen de l’Institut Notre-Dame Heusy partage son témoignage. Voici ce qu’elle a écrit pour le site de l’école.
Notre école a participé à la campagne de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui proposait 15 minutes de lecture silencieuse pour tous. Des caves au troisième étage, du secrétariat au hall omnisport, la lecture a permis, pour tous ceux présents à l’école à ce moment, une pause, souvent apaisante.
Au-delà du moment symbolique d’arrêt des cours, la démarche communautaire autour du livre engendre des pratiques enthousiasmantes : un prof de gym qui apporte son stock de bandes dessinées, 54 caisses de lectures en « dépannage » confectionnées par la médiathèque et des profs de français, des échanges sur l’expérience vécue, des discussions sur les choix des lectures apportées par chacun.
Le quart d’heure est vite passé et plusieurs déjà se demandent quand aura lieu le prochain moment suspendu entre silence et mots intériorisés…juste pour le plaisir !
Personne de contact : Simon-Pierre Baiwir (directeur)
Téléphone : + 32 (0) 087 29 10 77
Email : direction@notredameheusy.be
Article sur le site de l’école : http://bit.ly/2PPjQxw
« L'apprentissage de la lecture est essentiel»
Depuis que j’ai lancé le défi « Tout le monde lit » il y a trois ans, je constate tous les jours les bienfaits sur mes élèves, témoigne Liliane Mathieu, enseignante en 1ère et 2ème primaire à l’école communale de Jauche.
Pourquoi ai-je participé au défi « Tout le monde lit » ? Pour développer le goût de la lecture avec mes élèves de manière originale.
Nous lisons tous 15 minutes tous les jours...
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Avec l’aide du repère visuel : le sablier ⌛️
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Avec le rituel boîte à musique 🎵: pour marquer le début et la fin du moment lecture 📖
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Au coin lecture, sur sa chaise, en dessous d’une table, dans le jardin de mots de l’école... tant de possibilités.
J’ai remarqué qu’en adoptant ce rituel lecture, mes élèves étaient plus calmes, apaisés. Leur vocabulaire s’est nettement amélioré. Ils retiennent mieux les détails. Et ils ont ainsi beaucoup plus de connaissances littéraires.
Après le moment de lecture, on discute en posant des questions sur les livres lus.
L’écriture est partout autour de nous. La maitrise de la lecture est un prérequis indispensable pour prendre pleinement sa place en tant que citoyen et être une personne présente et active dans notre société. Les personnes ne sachant pas lire sont mises à mal dans de multiples situations.
L’apprentissage de la lecture est essentiel.
Le défi est un excellent moyen de motiver les enfants et de connaître les auteurs et tout particulièrement ceux de chez nous.
Personne de contact : Liliane Mathieu